Baptême de l’Atlantique
Après les Baléares en hiver, les Canaries en hiver ! Le flot annuel des voiliers en partance pour la transatlantique s'est écoulé depuis quelques semaines, je découvre donc cet archipel espagnol le long de la côte africaine dans sa quiétude hivernale. Lanzarote n'est pas la plus fréquentée des îles, elle est assez préservée des grands complexes hôteliers où déferlent les touristes allemands.
Le détroit de Gibraltar
Départ de Gibraltar bien matinal, conformément aux instructions marines qui préconisent également de lécher la côte en attendant la renverse des courants. J’expérimente, à une centaine de mètres trop loin de la rive, je suis scotché ! Il n’y a pas de vent mais ça avance bien, avec seulement un filet de moteur, c’est une grande nouveauté pour moi ces marées. Je capte un mélange de radios espagnoles, arabes et même un peu de français venu du Maroc. Puis soudain c’est l’effroi, je reçois les premières dépêches à propos de l’attaque terroriste au siège parisien de Charlie Hebdo. Le réseau GSM s’éloigne avec Tarifa, je n’ai pas le temps d’obtenir plus de détails et me voici parti pour 5 jours de navigation au large, plein de questions...
- Détroit de Gibraltar
- Les instructions marines préconisent de lécher la côte en attendant la renverse des courants. J’expérimente, à une centaine de mètres trop loin de la rive, je suis scotché !
Comme sur un tapi roulant
Baptême de l’Atlantique pour Faroubavoile qui quitte la Méditerranée pour la première fois. Au débouché du détroit de Gibraltar, je prend deux belles bonites en un rien de temps. Les nombreux pêcheurs ne se trompent guère sur la richesse de ces eaux. Le vent se lève comme prévu et j’ai l’impression d’être sur un grand tapi roulant : rien ne sert de garder trop de toile, lorsque que je le comprends, j’affale la grande voile et le génois seul suffit amplement. Le temps passe assez vite à admirer les vitesses folles de mon voilier, à se régaler des bonites, rêver des Canaries. Il est clair que le point de non retour a été franchi, j’ai peu envie de faire demi-tour dans ce vent et cette houle !
- Sur un tapi roulant
- Il est clair que le point de non retour a été franchi, j’ai peu envie de faire demi-tour dans ce vent et cette houle !
- Bonite à tous les repas
- Vu la quantité de poisson frais remonté à bord, il faut inventer des recettes !
- Crêpes acrobatiques
- Dans la houle de l’Atlantique il faut ruser pour ne pas renverser la pâte à crêpe.
Arrivée aux Canaries
Arrivé au nord de l’archipel en fin de nuit, je me prépare un bon thermos de café afin de rester éveiller et gérer l’atterrissage. Je retrouve du réseau GSM et découvre la vague de « Je suis Charlie » sur Facebook, que dis-je, c’est un tsunami ! Seconde mauvaise nouvelle, un des gros sites internet dont je m’occupe a été piraté, visiblement en lien avec la vague d’attentats. Lorsque que j’arrive, à la toute nouvelle marina d’Arrecife, pile à l’heure prévue, je m’amarre au levé du jour pour enchainer sans transition sur le sauvetage du site. Autant vous dire qu’une fois le travail achevé, je suis tombé de sommeil en lieu et place !
- Kit de survie nocture
- Je me prépare un bon thermos de café afin de rester éveiller et gérer l’atterrissage.
Arreciffe
C’est une escale très boulot, autant sur internet que pour finir la préparation du voilier à la traversée de l’atlantique en solitaire. Je fais néanmoins d’agréables rencontres, comme un couple de français que je croiserai peu après le Cap Vert. Je sympathise avec le loueur de voiliers du ponton qui me fait partager un peu de vie locale. J’ai pour voisin un pavillon australien, qui n’est autre que celui de La Vagabonde ! On fait connaissance en se faisant un festin du trésor récupéré par Riley à la fermeture de la pâtisserie française. Les jours suivants, on va faire les magasins (de bricolage bien sûr) puis on dévalise un fantastique grossiste en fruits et légumes locaux sur le chemin du retour.
- Arrecife
- Au centre de la ville, il y a un bassin beau en toutes heures, les pêcheurs y laissent leurs barques.
- Fruits et légumes des Canaries
- Un entrepôt à tomber ! Nous le dévaliserons avec l’équipage de La Vagabonde.
La Graciosa
Une fois les magasins d’accastillage épuisés, ayant fait tout mon possible pour la réparation de mon pilote auto, je vais passer le WE à Graciosa, une petite île préservée au nord de Lazarote. En chemin, mon réservoir d’eau se vide par une déchirure sur son dessus, j’affale les voiles et mets en route le moteur pour limiter la gite. Peu après, j’entend une alarme provenant de la VHF : surtension, alors même que je suis obligé de faire du moteur ! J’allume tout ce qui consomme de l’électricité, le Faroubavoile se transforme en véritable sapin de Noël. De nuit, je mouille à la Playa Francesa, au réveil le spectacle est grandiose. Je suis au pied d’un volcan, avec dans mon dos la face abrupte de Lanzarote. Autour, sur les reefs, ça surf. Puis, comme le vent se lève et que la météo du week-end n’est pas géniale, je vais vite m’abriter au minuscule port avant que la manœuvre soit trop compliquée. Je m’affaire à diagnostiquer mes problèmes et profite ici aussi d’une super boulangerie où je prend mes petits déjeuners et souvent un gouter en fin de journée. Je loue un VTT afin de faire le tout de l’île à la découverte des sublimes plages aux vagues immenses. La baignade est fortement déconseillée, tout comme la chute depuis l’impressionnante arche rocheuse qui enjambe un canyon dans lequel s’engouffre et explose toute la puissance de l’océan.
- En route pour Graciosa
- En chemin, mon réservoir d’eau se vide par une déchirure sur son dessus, j’affale les voiles et mets en route le moteur pour limiter la gite.
- La Graciosa
- Comme le vent se lève et que la météo du week-end n’est pas géniale, je vais vite m’abriter au minuscule port avant que la manœuvre soit trop compliquée.
- VTT aux Canaries
- Je loue un VTT afin de faire le tout de l’île à la découverte des sublimes plages aux vagues immenses.
- L’arche des enfers
- Impressionnante arche rocheuse qui enjambe un canyon dans lequel s’engouffre et explose toute la puissance de l’océan.
Deux cadis !
De retour à Arrecife, je fais le tour de la ville pour trouver un électricien qui n’arrivera pas à réparer mon alternateur. Je récupère également mon pilote sans trop être convaincu, car je ne comprend pas vraiment ce qui y a été fait. Je prends rendez-vous à la marina de Porto Calero pour sortir le voilier de l’eau, pensant n’y faire qu’une opération commando pour installer une hélice bec de canard. Je fais donc l’avitaillement pour la transatlantique : deux cadis plein à la fermeture de l’hypermarché ! Je bricole jusqu’à tard dans la nuit et me met en route de bonne bonne heure. Le pilote automatique me lâche quinze minutes après la sortie du port, sous spi, dans la brise, génial !
- Avitaillement pour traverser l’Atlantique
- Avitaillement pour la transatlantique : deux cadis plein à la fermeture de l’hypermarché !
Perdre l’hélice bêtement
J’arrive tout de même à l’heure au rendez-vous sous la grue, en deux coups de cuillère à pot, le voilier hissé hors de l’eau par une équipe de professionnels. Deux heures plus tard, je suis à nouveau à flot et enclenche la marche arrière pour sortir des sangles : rien ne bouge ! Je me dis qu’en effet la bec de canard ça demande du temps à réagir, j’essaye la marche avant. Toujours rien, problème... la grue reprend prise et surprise, plus d’hélice ! Je saute à l’eau, trop froide alors que je suis épuisé par la nuit précédente à bricoler, la matinée de voile et que je n’ai pas mangé depuis la veille. Je crains l’accident idiot, on décide de caler le voilier à terre et j’y grimpe faire une bonne sieste avant un bon casse croute. Vêtu de ma combinaison de chasse, de la ceinture de plomb, en bien meilleure forme, je plonge et en deux essais l’hélice est récupérée. Verdict simple par Félix, le très compétent et serviable chef du chantier : j’ai oublié de mettre la petite clavette qui l’empêche l’hélice de tourner autour de l’arbre sur lequel elle est visée ! Dans mon malheur, j’ai eu la chance de tomber sur des gens honnêtes et compétents comme Mr Volvo qui me fournira les joints de la pompe de refroidissement et le fameux régulateur d’alternateur. Pour le pilote, pas le choix il faut changer, c’est géré par un spécialiste franco-allemand qui adaptera les prises à mes boitiers. J’arrive même à faire réparer mon petit spi par ami français à lui, merci Olivier ! Petit avitaillement pour compléter ce que j’ai consommé pendant l’escale technique qui a durée un peu plus que prévu puis le 3 février, à la nuit tombée, je vais faire les pleins de gasoil et d’eau puis hisse les voiles pour les Antilles !
La suite : la transatlantique
Dans mon prochain article, vous découvrirez le récit de ma traversée de l’Atlantique en solitaire. Combien de temps ai-je mis, mon meilleur moment, mon pire moment lorsque j’ai couché le voilier pendant quinze minutes, ma rencontre avec les baleines... Exceptionnellement cet article vous sera offert sous forme de mini-livret envoyé par email à sa sortie. Pour cela, indiquez-moi ci-dessous l’adresse à laquelle vous l’envoyer !
En attendant, je vous laisse découvrir les premières pages de mon Carnet de bord : Baléares, Gibraltar puis un bon dans le futur avec les Turks and Caïcos et les Bahamas !